Un bon compromis ???

Publié le par Fred

Il faudrait être sacrément naïf pour croire que la pirouette chiraquienne change quoi que ce soit à la position de la gauche et des syndicats. Les deux "améliorations" proposées par Chirac sont celles que Villepin proposent de lacher depuis 15 jours sans que cela ait enrayé la massification et la radicalisation du mouvement.  Non, l'objectif de Chirac est ailleurs : d'une part, sauver la tête d'un premier ministre qui, de sources concordantes, avait mis sa démission dans la balance, d'autre part couper le mouvement de son soutien populaire en incarnant "celui qui propose" face à des syndicats qui "fermeraient la porte à toute discussion".

Tactiquement, cela peut sembler bien joué. C'est cependant une position très ardue à tenir... Comment se prétendre le garant de la démocratie tout en intimant l'ordre aux entreprises de ne pas appliquer la loi de la République ? Comment appeler au dialogue et à la concertation tout en donnant, au mépris de la séparation des pouvoirs, une feuille de route impérative au parlement ? Tout cela est illusoire, et tend au contraire à prolonger la crise : avec cette nouvelle loi, on donne rendez-vous à la rue pour qu'elle mette la pression sur le parlement, on donne l'occasion à l'opposition de faire campagne sur des propositions alternatives qui seront rejetées, et cela prendra beaucoup de temps, sauf à reproduire les mêmes erreurs (une seule lecture, un 49.3, une absence de CMP...) que le gouvernement se gardera bien de faire...

Sur le fond, la réduction de la période de consolidation et le rétablissement de la motivation forment-ils un bon compromis ? Villepin affirmait haut et fort que le deuxième point constituait le "coeur du projet". Le problème, c'est que derrière sa validation "sans réserve" sur la forme, le Conseil constitutionnel avait déjà tué cette disposition sur le fond (point n°25 de sa décision) : reprenant à son compte la jurisprudence qui est en train de se construire sur le CNE, il avait rappelé que le CPE n'excluait pas le droit au recours pour licenciement abusif, et qu'il restait à la charge de l'employeur de prouver l'existence d'un motif licite (conforme, donc, au droit du travail). C'était là un désavoeu du ministre de la justice (qui a demandé aux parquets de faire appel contre toute décision qui reconnaîtrait cette nécessité d'un motif licite), et une interprétation qui s'impose désormais à toute juridiction.

Dans ces conditions, comment imaginer que les entreprises puissent avoir recours à un contrat moins interessant pour elles que le CNE (qui concerne tout de même 96% des entreprises françaises) qui conserve les 2 ans de "consolidation", ou que les CDD, qui peuvent être reconduits pendant 18 mois, et prennent fin sans motif ? La réalité du "compromis", c'est donc une loi inutile, inappliquable et en définitive, un retour à la case départ.

Cetains penseront que c'était l'objectif des manifestants et qu'il n'y a donc plus lieu de protester. Sans doute pourra-t-il ressouder sa majorité sur cette base. Mais c'est surtout une occasion manquée de plus de s'attaquer aux vrais problèmes du chômage en France, qui ne pourront être réglés qu'avec des réformes d'envergure : du système éducatif, de l'accès à la formation professionnelle, du droit du licenciement, des services publics de l'emploi... Cela ne pourra être mené qu'avec un large consensus des partenaires sociaux autour d'un diagnostic partagé. Précisément ce que le CPE a durablement hypothéqué. Tant que l'on aura pas compris cela, tant qu'on pensera la politique en termes de "vainqueurs" et de "vaincus", il n'y aura pas d'espérance pour la jeunesse.

Publié dans Politique

Pour être informé des derniers articles, inscrivez vous :
Commenter cet article
M
Je suis daccord avec vous sur votre commentaire Fred et qu'on ne peut pas nous proposer comme avenir " Prenez cela car c'est mieux que rien". Et meme si Villepin est en parti responsable de tout ce fiasco pathétique, ce que je trouve regrettable c'est de voir ce PS s'engouffrer d'une facon puérile dans ce mouvement avec comme vision uniquede pouvoir se relancer. Où sont les propositions ????<br /> Qui est le vrai perdant dans cette histoire ?<br /> Hé bah c'est la France et les vrais gagnants ce sont l'extreme gauche et l'extreme droite.<br /> On est revenu à un combat gauche/droite, combat idéologique où les syndicats non pas non plus briller il faut le dire. Beaucoup de désinformation de propagande et de discours simplistes dans cette histoire. Il ne faut pas s'etonner après que seuls 37% des fancais veulent de l'économie de marché. Quand est ce qu'on va enfin arreter d'opposer Social à Libéral dans ce pays ???<br /> OUI le capitalisme a ses dérives car il n'a pas de contre pouvoirs. Mais justement pour pouvoir améliorer le système afin de mieux répartir les richesses pourquoi on s'efforce en France de vouloir combattre le systeme de l'exterieur seul contre tous dans un monde globalisé, alors qu'il faudrait justement le changer de l'intérieur et la France pourrait peut etre avoir un role à jouer à ce moment là.<br /> Quand on aura enfin compris cela alors nous aurons deja beaucoup avancer. Alors vous me direz pourquoi en sommes nous arrivés là ?<br /> Ma réponse est que cela fait 30 ans que cela dure, par des politiques incapables et qui n'y connaissent rien à l'économie.<br /> Il ne faut pas se leurrer, une Segolene ou un Sarkozy n'y changeront rien. Les Francais dans leurs majorité en ont marre des carrièristes et moi le premier.<br /> Ne pouvons nous pas NOUS citoyens enfin nous prendre en main pour batir une Union Nationale qui mettra en place un gouvernement d'Union qui pourra avoir la confiance des francais pour reconstruire ce pays car il ne s'agit meme plus de le réformer mais de batir à nouveau.<br /> Je crois que la Démocratie participative et l'engagement citoyen sont les principaux piliers qui permettront de relever cette démocratie à bout de souffle. N'entendez vous pas les extremes qui montent.<br /> Chaque jour qui passe l'Espoir diminue. <br /> Mais REVEILLONS NOUS !! REVEILLONS NOUS !!! Allons nous attendre sagement de voir cette démocratie tomber.<br /> Je vous le dit, ni le PS, ni l'UDF et ni l'UMP ne seront des solutions pour 2007.<br /> La vraie question et je vous la pose : Sommes nous pret à devenir cette solution pour enfin batir ensemble un avenir meilleur ?<br /> http://u-c-d.over-blog.com/<br />  
Répondre
M
Ce qui est quand meme très regrettable, malgré le fait que Villepin s'est conduit en imbécile et qu'il est en parti responsable de tout ce fiasco pathétique, c'est l'attitude plus que puérile de ce PS qui s'est servi de ce mouvement pour se remmetre en selle.<br /> Malgré que je vous suis dans votre commentaire et qu'on ne peut proposer comme avenir " Prenez ceci, car ce sera quand meme mieux que maintenant ", on pourrait aussi analyser une autre facette de cette crise...<br /> ...car nous voila encore à nouveau dans un combat gauche/droite qui finit par devenir idéologique et qui ne fait que conforter tous ces élus carrièristes (mais aussi les responsables syndicaux) dans leurs places. Où sont les propositions ????<br /> On doit etre l'un des derniers pays à vouloir encore opposer Social à Libéral et on peut voir aujourd'hui les résultats avec des discours constants de propagande et de désinformation. On arrive <br /> Oui le capitalisme a ses dérives mais cela c'est parce qu'il n'a aucun contre pouvoir pour le moment. Alors les Francais doivent se mettre en tete que si ils veulent améliorer le systeme c'est de l'intérieur que cela se fera et non de l'éxterieur. On est dans un monde globalisé, on ne peut pas combattre seul contre tous un système, mais en revanche on peut montrer au reste du monde qu'on peut le rendre meilleur.<br /> Je vous le demande qui est gagnant dans cette crise ?<br /> Il n'y a en réalité qu'un seul perdant dans tout cela, et celui-ci c'est la France.<br /> Alors question pour vous Fred. Doit on continuer dans cette impasse qui dure depuis deja 30 ans ou alors enfin, NOUS, citoyens, on va se prendre en main pour mettre en place un gouvernement d'Union Nationale qui retrouvera la confiance des francais et qui pourra nous aider à reconstruire ce pays.<br /> Je vous le dit, ce n'est pas une Segolene ou un Sarkozy qui changeront quoi que ce soit. Vous n'entendez donc pas la montée en puissance de l'extreme gauche et de l'extreme droite. Les francais en ont assez des carrièristes et moi le premier.<br /> Mais Reveillons NOUS !!! Reveillons NOUS !!! Car ca ne peut plus durer. Chaque jour qui passe l'Espoir diminue de voir ce pays se relever. <br /> Alors ma question est pour vous : Sommes nous enfin pret à sortir de ces combats idéologiques et à preparer ENSEMBLE notre avenir ?<br /> La vérité est que ni le PS, ni l'UMP, ni l'UDF ne seront une réponse pour 2007, mais seuls les citoyens pourront l'etre.<br />  
Répondre
F
Marc, <br /> Je pense que si le CPE avait fait l'objet d'une information et de discussions avec les syndicats avant d'être présenté à la hussarde par voie d'amendement, ton objection pourrait se tenir. Mais cela n'a pas été le cas : c'est le choix d'un homme seul contre tous (même contre sa majorité et ses ministres concernés) qu'il n'a crû bon de "discuter" qu'une fois qu'il s'est avéré que cela le conduisait dans le mûr.<br /> Dans ces conditions, je ne cros pas que le rôle des syndicats soit de servir de béquille à un premier ministre qui va tomber. La realpolitik, c'est aussi savoir conforter une position de force si l'on peut obtenir davantage que ce qui est proposé. Personne n'aurait compris qu'ils cèdent les premiers avec un tel avantage populaire et médiatique. Et je crois qu'ils ont eu raison de ne pas le faire.<br /> Je crois que l'on fait une grave erreur d'appréciation si l'on en conclut que le pays n'est pas réformable ou que les syndicats refusent toute négociation. Le CPE, ce n'est pas l'alpha et l'oméga de la flexibilité : C'est un contrat qui repose sur l'idée que "ceux qui n'ont rien n'ont rien à perdre". C'est cette philosophie qui est mauvaise et qui a été rejetée dans la rue. Parlons du chômage des jeunes, parlons de flexibilité, mais organisons-là dans un souci de justice, de solidarité entre les générations, et avec l'ambition de construire un modèle social alternatif.
Répondre
M
Oui, tu as raison c'est un retour à la case départ, et donc à une situation inchangée pour ce qui concerne  l'emploi des  jeunes et la précarité.  Sans vouloir exonérer  le gouvernement et particulièrement Villepin de sa responsabilité dans ce gâchis (ce premier ministre est une catastrophe!), je pense qu'il aurait été plus constructif que les syndicats acceptent de discuter des aménagements importants au lieu de s'en tenir à une position de refus absolu. <br /> Ce refus du dialogue , bien Français et bien dans la tradition d'une gauche sans projet , est désespérant. <br /> A toi, <br /> marc d'Héré
Répondre